Nos régions ont du talent. Et ce n’est pas les Frères Ducret qui vont nous faire dire le contraire. Les deux frangins sont la preuve que l’on peut être jeune, habiter dans le Doubs et n’avoir rien à envier au reste du monde. Portraits de deux frères créateurs, qui ont moins de 25 ans, et qui avec une pointe d’insouciance et une grosse dose de fun et d’audace, ont monté leur distillerie qui livre un regard contemporain sur leur terroir ! Et on aime sacrément ça chez ForGeorges !
Pouvez-vous vous présenter ?
Je m’appelle Richard Ducret, je viens d’avoir 25 ans, je suis originaire de Flangebouche dans le Doubs à 20min de la frontière suisse, village où il y a 4 ans nous avons fondé avec mon petit frère Arthur notre distillerie artisanale !
Comment est née l’idée d’avoir votre propre distillerie ?
Je pense qu’on a toujours un peu été par l’univers de la boisson, des cocktails et autre. On aimait bien faire la fête aussi, en commençant par des cocktails, des rhums ou vodkas arrangés. On a trouvé par hasard la recette de la sapinette. Pas vraiment un hasard vu qu’ici on est entourés de sapin. Ensuite, ça a tout de suite plu et on a démarré l’entreprise très vite, à l’époque on était encore les deux à l’école, on faisait ça les week-ends !
Ouvrir une distillerie dans le Doubs, en étant aussi jeune, quels sont les obstacles que vous avez dû surmonter pour arriver à vos fins ?
Alors on dira ce qu’on veut, mais on est forcément beaucoup moins crédibles. L’alcool, ce n’est pour beaucoup pas un truc de gamins ! Surtout qu’ici dans le Doubs, il y avait pas moins de 7 distilleries pour la plupart très réputées… Donc il fallait très vite qu’on fasse nos preuves, et qu’on s’aligne aussi sur les tarifs. Mais je pense qu’à l’inverse, c’est aussi le fait d’être jeune qui nous a aidés. L’attachement des gens aux produits de leur terroir, et de voir qu’il y a une relève ! Le temps a su nous faire une place et aujourd’hui notre savoir-faire commence à être reconnu, pour notre plus grand bonheur.
Quel est votre matériel de distillation ? Pourquoi être parti sur ce matériel ?
Nous avons un alambic traditionnel (« à repasse ») tout cuivre de 200L, chauffe directe, avec une lentille de rectification pour certaines occasions. Pour moi, c’est le plus simple. Sur ce type d’outil, on n’a pas droit à l’erreur. C’est aussi une façon de montrer le savoir-faire et de perpétuer celui des anciens. Au goût, ça sonne aussi différemment ! Ça apporte un côté presque rustique, parfois saccadé, très franc sur les arômes. Ça nous fait des produits qui ne mentent pas.
Liqueur d’aiguilles de sapin fumées, sapinette … Des produits qui sortent des sentiers battus. Quelle est votre inspiration pour créer vos produits ?
On s’inspire surtout de notre terroir qui a beaucoup à offrir ! La Franche-Comté a une multitude de produits. Elle est aussi intimement liée à l’histoire des spiritueux français (Absinthe, kirsch, etc…), mais l’histoire c’est moins notre truc. On se sent plus comme investit de bouger tout ça. Le fumé, c’est un bon exemple : c’est traditionnel ici, des saveurs typiques très marquées. On était surpris de voir que personne n’avait cherché à le mettre en bouteille ! Donc on cherche plutôt à exprimer notre terroir autrement, au goût du jour…
Où sont distribués vos produits, où peut-on les trouver ?
On ne travaille pas avec la grande distribution, car on part du principe que nos produits se découvrent, s’explique, s’accompagne, il faut de la dimension humaine, de l’échange, pour garder pédagogie et convivialité. Donc principalement chez les cavistes, magasins de produits régionaux, bars et restaurants, en Franche-Comté et alentour. Pour les plus curieux, notre boutique en ligne expédie dans toute l’Europe !
Outre le gin qui vient de sortir, avez-vous d’autres produits qui vont sortir sous peu ?
Ça fait sourire, mais on a vraiment beaucoup de choses dans les tuyaux par rapport à ce qui aboutit ! Nous essayons de toucher vraiment à tout. Ce qui n’est pas à l’ordre du jour, c’est plutôt les anisés et les absinthes, car il y a vraiment un niveau exceptionnel ici, qui vient de décennies de savoir-faire ! On est un peu plus timides et on respecte, mais on ne ferme pas la porte. Mais le Gin était un projet de plus d’un an et demi, et on a pas mal de travail encore, car on aimerait être ceux qui amènent la tendance par chez nous.
Est-ce que faire vieillir des spiritueux est à l’ordre du jour de Ducret Frères ?
Complètement ! Les vins du Jura offrent de superbes opportunités sur les fûts et on peut déjà constater chez nos confrères les spiritueux qu’ils subliment. Il faut de la place et de la trésorerie donc c’est difficile quand on est tout neuf, mais le résultat en vaudra la peine ! Surtout que nous sommes super jeunes, donc on les imagine déjà vieillir avec nous, ce serait magnifique.
Est ce que les consommateurs peuvent vous rendre visite ?
Pour le moment on manque de place. On est sans cesse en train de se réorganiser et de chercher de la surface. On aimerait beaucoup être ouvert au public, mais c’est quelque chose qu’on ne peut pas offrir de suite. Il faut quand même que ça reste un plaisir pour le visiteur…
Quand les concurrents en face sont des grandes marques internationales de spiritueux, comment fait-on pour sortir du lot quand on est une jeune distillerie comme vous ?
Nous avons beaucoup de respect pour ces entreprises qui perpétuent cet héritage. Qui sait si on serait tombé dans le métier sans ça ? Après, il y a de la place pour tout le monde, à toute échelle, mais chacun a ses atouts. On essaye d’avoir beaucoup de réactivité, d’être souples, d’avoir des relations avec nos clients qui vont au-delà du commercial… Mais sortir du lot c’est finalement à mes yeux plus faciles à notre échelle. Même si en fait on y pense pas trop, on se concentre sur nos produits, on veut avant tout régaler, et le reste ça viendra tout seul…
Avez-vous l’ambition de devenir une grande distillerie ou rester une distillerie artisanale ?
Artisanale, c’est déjà quelque chose qu’on voit à toutes les sauces. Pour nous, ça veut dire travailler et embouteiller à la main. C’est quelque chose qui pour nous donne du sens qu’on aimerait garder au maximum.
Avec les spiritueux, il faut reconnaître qu’il est possible de faire de très grandes productions et garder une qualité irréprochable (on peut le constater). Après c’est plutôt à nous de voir ce qu’on aime faire, arriver le matin pour compter des chiffres et éteindre des incendies ce n’est pas quelque chose qui me botte. Concevoir des recettes et sortir des produits beaucoup plus. On verra où on va, mais on ne va jamais oublier de s’amuser et de se marrer.
Est-ce que vous avez souffert de la période de confinement au niveau de vos ventes ?
Oui, on a la même courbe que beaucoup. On regrette peut-être de ne pas avoir sorti notre gin plus tôt quand on voit comme le marché du gin en a profité. Nous avons développé notre boutique en ligne et énormément bossé sur nos prototypages. Cela permet aussi de voir les choses autrement…
Qu’est-ce qu’on peut souhaiter à Ducret Frères pour la suite ?
De ne pas se perdre en route ! De continuer à travailler entourés de gens qu’on apprécie et de faire des trucs qui nous font kiffer !
Si vous deviez donner un conseil à quelqu’un qui voudrait s’inspirer de votre exemple, quel serait t-il ?
Simplement de ne pas faire les choses à moitié. Un moment, il ne faut plus réfléchir et foncer, s’immerger à 200% et que tu aimes que tu t’amuses. Moi je danse dans la voiture quand j’ai gagné un nouveau client ! Il ne faut pas oublier de vibrer !