The Bartenders Society célèbre cette année son dixième anniversaire : une véritable aventure humaine où passion, partage et créativité se rencontrent et avec exceptionnellement pour cette édition, la finale France Hexagonale qui se déroulera en Martinique. Chaque année, des bartenders du monde entier viennent y confronter leur talent, échanger avec des experts de renom et repousser leurs limites. Pour cette édition anniversaire, l’événement s’annonce encore plus grandiose, entre célébrations historiques et moments de transmission inoubliables.

Dans cette interview, Yoann Peffer, gagnant France The Bartenders Society 2024 revient sur son expérience au sein de la compétition, les défis qu’il a dû surmonter et ce qu’il attend des futurs candidats. Entre anecdotes, conseils et souvenirs marquants, il nous plonge dans l’univers de The Bartenders Society.

Qu'est-ce qui t'a motivé à participer à The Bartenders Society l'année dernière et comment as-tu préparé ta candidature ?

J'avais déjà participé en 2023, c'était ma première fois. J'avais entendu parler du concours, mais c'est mon commercial qui m'a vraiment encouragé à tenter ma chance. J'avais envie de sortir de ma zone de confort et de me challenger. J'ai adoré l'expérience en 2023 et je me suis dit que je referais ce concours jusqu'à le gagner. Le thème de 2024, "le futur", me parlait particulièrement, donc j'ai foncé.

As-tu changé ton approche par rapport à 2023 ?

Oui, en 2023, j'avais des idées mais c'était un peu brouillon. Après avoir échangé avec le jury, j'ai compris l'importance de la structure et de la clarté dans la création de mes cocktails. Pour 2024, j'ai commencé par le storytelling avant de créer mon cocktail. J'ai réfléchi à ce que le futur représentait pour moi, puis j'ai affiné mes idées avant de concevoir ma recette, en veillant à un lien logique entre l'histoire et le verre.

Peux-tu nous raconter ton expérience lors de la finale France ?

L'organisation était impeccable, ce qui met en confiance. J'ai traversé toutes les émotions possibles : stress dans le train en direction de Paris, préparation minutieuse de mes ingrédients, et une montée d'adrénaline en arrivant sur place. Retrouver des amis concurrents m'a aidé à me détendre, mais l'angoisse est revenue en apprenant que je passais en deuxième position.

Je m'étais bien entraîné sur mon storytelling, donc une fois sur scène, j'étais à l'aise. L'attente des résultats était interminable. Quand ils ont annoncé le troisième, puis le deuxième, je pensais que ce ne serait pas encore pour moi. Et puis, à ma grande surprise, j'ai été déclaré vainqueur ! Sur le moment, j'ai buggé, puis l'émotion a pris le dessus. C'était un vrai bonheur. Mais très vite, la pression est revenue avec la finale internationale à préparer !

Tes cocktails ont séduit le jury. Quelles étaient tes inspirations ?

Le thème du futur m'a poussé à travailler sur trois axes : l'éco-responsabilité, le "zéro déchet" et le bien-être. Dans notre métier, on consomme beaucoup d'eau et on produit pas mal de déchets, donc j'encourage mon équipe à réduire son impact. Par exemple, nous utilisons des bouteilles consignées et réutilisons nos contenants.

Côté produits, j'ai mis l'accent sur le circuit court, notamment avec l'abricot, un fruit emblématique de ma région. Je l'ai travaillé sous différentes formes : oreillons lacto-fermentés au piment, sirop de noyau, etc. J'ai voulu créer un pont entre mes deux cocktails en utilisant des ingrédients communs.

J'ai choisi le rhum Saint James Bio pour son engagement en faveur du "zéro empreinte carbone", en cohérence avec mon message. J'ai aussi joué sur les épices, comme la cardamome et la cannelle, et proposé un cocktail sans alcool servi à température ambiante, avec un glaçon aromatisé au thé chai qui évolue au fil de la dégustation.

Mon cocktail avec alcool s'appelle "First Step" (la première marche) et mon sans alcool "Beyond Zero" (au-delà du zéro). Ensemble, ils forment une phrase qui résume ma démarche : "La première marche vers le zéro déchet". C'était important pour moi de donner une unité à mon travail et de proposer des boissons qui racontent une histoire cohérente.

Selon toi, quelles sont les qualités indispensables pour se démarquer dans le concours The Bartenders Society ?

Pour se démarquer, il faut un très bon niveau. Chaque année, le niveau augmente, que ce soit en France ou à l'international. Les candidats proposent des choses incroyables, utilisent des techniques poussées... Donc, si on veut vraiment sortir du lot, il faut être très efficace sur les saveurs qu'on présente au jury. Il ne suffit pas d'empiler les goûts, il faut que chaque saveur annoncée soit clairement perceptible.

En plus de la maîtrise technique, un bon storytelling est essentiel. Beaucoup conçoivent un cocktail puis lui cherchent une histoire, alors que, selon moi, il faut faire l'inverse : partir d'une histoire pour créer le cocktail. Une belle histoire qui embarque le jury, c'est un vrai plus.

D'ailleurs, en 2023, j'avais voulu trop en faire au niveau des saveurs, et on m'a reproché que certaines se perdaient. Donc mon conseil : rester clair, lisible, et cohérent.

Comment ta victoire a-t-elle impacté ta carrière et quelles opportunités se sont ouvertes à toi depuis ?

Professionnellement, ça a été un grand moment. Mes patrons me soutiennent dans les concours et sont très fiers. On a eu une belle couverture médiatique : interviews, passage sur BFMTV, Masterchef... Il y a même un article qui va bientôt sortir. Dans ma ville, ça a été un vrai événement. On est une petite ville de la Côte d'Azur, loin des grandes places du cocktail comme Paris ou Lyon. Du coup, ça a suscité beaucoup d'intérêt.

Chaque jour, des clients viennent me féliciter, poser des questions, demander à goûter le cocktail de la finale. Ça a aussi ouvert des portes avec des marques et maisons. Ce sont ces rencontres qui rendent tout cela très enrichissant.

Ce que cette expérience m’a apporté professionnellement, c’est aussi l’opportunité de travailler avec l’équipe BLMHD à Paris. C’est extrêmement stimulant de collaborer avec elle : on a créé ensemble des cocktails pour Noël, Dry January et la Saint-Valentin. Elle a même sollicité mon avis pour la création du site. C’est un vrai échange avec les marques, et c’est ça qui est vraiment génial. Quand on gagne The Bartenders Society, on ne se contente pas d’être le champion d’une année avant de devenir jury et de s’arrêter là. On est réellement intégré dans le processus.

J’adore cette proximité avec les marques et cette collaboration qui va au-delà du concours.

Quel a été le moment le plus marquant de la compétition pour toi ?

Sans hésitation, l'annonce de mon nom. Il était 8h15 du matin, j'avais encore les yeux collés, mon café dans la main... Quand j'ai entendu mon nom, j'ai jeté mon café et j'ai foncé sur scène pour recevoir mon prix. Je ne m'y attendais pas du tout. J'étais fier de ma prestation, mais vu le niveau général, je pensais avoir peu de chances. Là, c'était un vrai feu d'artifice dans ma tête.

Quel conseil donnerais-tu aux bartenders qui hésitent à s'inscrire cette année ?

Il ne faut pas hésiter ! The Bartenders Society est un concours à part. Les thèmes sont inspirants et changent chaque année. Ce n'est pas juste un concours monomarque où l'on doit créer un seul cocktail alcoolisé. Ici, il y a deux cocktails à imaginer, dont un sans alcool, ce qui ouvre davantage la créativité.

Personnellement, je ne participe à un concours que si le thème me parle. Et The Bartenders Society propose toujours des thématiques variées. Cette année, c'est le dixième anniversaire, donc ça promet !

Surtout, c'est une véritable communauté. Au départ, je pensais que ce serait ultra-compétitif, chacun pour soi. Mais pas du tout. Je suis devenu pote avec la plupart des concurrents. On échange tous les jours sur un groupe WhatsApp. Si quelqu'un hésite sur une recette, il envoie un message et on se conseille mutuellement. C'est un vrai réseau de soutien.

En plus, les masterclasses sont très enrichissantes. Parler cinq minutes avec des experts comme Stephen Martin ou Matthias Giroud peut changer ta vision du bar.

Contrairement à d'autres concours où chacun veut gagner à tout prix, ici, quand j'ai remporté le titre, les autres étaient aussi contents que moi. Donc vraiment, si vous hésitez : foncez !

Comment décrirais-tu l’ambiance et l’esprit de The Bartenders Society ?

Franchement, c’est une ambiance hyper familiale. Il y a une vraie bonne énergie, tout le monde est dans le même bateau et on essaie tous de se tirer vers le haut. Il y a énormément de partage, et si je devais résumer The Bartenders Society en un mot, ce serait justement ça : le partage.

Que ce soit avec les membres du jury pendant les masterclass ou entre les concurrents, l’échange est constant. Ça m’a ouvert l’esprit sur plein de choses et m’a aussi permis d’expérimenter des idées que j’hésitais à tester. Parfois, on se pose des questions, on n’est pas sûr de la bonne approche

Et les membres du jury sont très accessibles. Tu sens qu’ils vivent l’événement avec nous, qu’ils sont aussi investis que nous. Ils ne prennent pas ça à la légère et chaque année, ils font venir des pointures internationales incroyables. Ce qui est génial, c’est que tu peux discuter avec eux naturellement, que ce soit de cocktails ou juste de la météo. Il n’y a pas cette barrière “jury d’un côté, candidats de l’autre” - on est tous ensemble, on passe un bon moment et on donne le maximum.

Quel défi t’a semblé le plus difficile et comment as-tu réussi à le surmonter ?

Sans hésiter, le passage sur scène.

La première année, en 2023, je ne m’étais pas du tout entraîné. J’y suis allé en mode détente, comme si je prenais mon shift derrière le bar. Mais une fois sur scène, avec le chrono de huit minutes et tous ces gens qui scrutaient mes moindres gestes, j’ai commencé à trembler.

En 2024, j’ai compris que cette épreuve était cruciale. Avoir de la prestance, être à l’aise, ne pas bégayer… Ça peut vraiment faire la différence pour la victoire. La première fois, j’avais tellement le stress et la pression du temps que je n’ai pas dit tout ce que je voulais. Je ne voulais surtout pas refaire cette erreur. Du coup, je me suis entraîné sérieusement.

J’ai aussi appris à mieux gérer l’environnement. Au bar, tu connais ton espace, chaque chose est à sa place. En compétition, tu découvres ton poste et tu dois t’adapter. J’ai donc pris le temps de bien m’installer, d’organiser mon matériel. Et j’ai aussi utilisé une astuce toute simple : une petite feuille avec des mots-clés pour structurer mon discours et être sûr de ne rien oublier.

Pour m’entraîner, j’ai fait appel à mon équipe après les shifts. Je leur disais : “Les gars, je fais mon passage, soyez honnêtes, dites-moi ce qui ne va pas.” Au début, c’était juste mon second de bar, puis mon apprenti, mon chef de rang, mon directeur… À la fin, ils étaient cinq, alignés à 40 cm de moi, comme un vrai jury. À chaque répétition, j’améliorais un détail. Le jour de la finale, je savais que j’étais prêt. Et ma petite feuille était là, juste au cas où.

Si tu devais participer cette année, quel événement mettrais-tu en avant et quel cocktail proposerais-tu ?

En fait, j’ai déjà répondu à cet exercice avec la Masterclass Digital sur The Bartenders Society. J’ai créé deux cocktails inspirés de moments marquants de ma vie récente.

Le premier, sans alcool, rend hommage à ma lune de miel au Mexique en 2023. Avec ma femme, on est allés dans une taqueria locale. Je ne parle pas espagnol, donc j’ai commandé un plat un peu au hasard : un tacos à la viande de porc et à l’ananas, cuit façon kebab avec plein d’épices. J’ai adoré ce mélange sucré-salé, et j’ai voulu le retranscrire en cocktail.

J’ai donc pris du jus d’ananas que j’ai fat-washé avec du gras de bacon, puis infusé avec un mélange d’épices mexicaines. J’ai aussi préparé un sirop épicé et fumé pour rappeler la cuisson de la viande. Ensuite, j’ai ajouté un jus d’agrumes (citron vert, orange), et j’ai gazéifié le tout pour donner une texture rafraîchissante.

Pour mon cocktail avec alcool, je me suis inspiré de la naissance de ma fille en janvier. J’ai voulu recréer le concept de notre gender reveal avec un cocktail qui change de couleur.

J’ai infusé du rhum Fleur de Canne Saint James avec du thé bleu papillon et préparé un sirop au jasmin et au thé bleu papillon. Ce mélange, je le servais à côté dans une petite carafe. Dans le verre, j’avais un sour à base de Falernum - une liqueur qui m’a porté chance en 2024. Le cocktail est blanc, légèrement opaque, avec une mousse blanche et des pétales bleus. Et quand on verse la carafe dedans, il devient rose-violet grâce à la réaction avec l’acidité. Un clin d’œil parfait à l’annonce du sexe de ma fille.

Que ce soit dans ma vie personnelle ou à l’échelle du monde, il y a toujours des événements heureux à célébrer.

Cette année, en tant que membre du jury, j’attends vraiment des candidats qu’ils me transmettent une émotion forte. Je veux ressentir quelque chose quand ils racontent leur histoire, avoir des frissons en les écoutant. Je veux qu’ils me fassent voyager, qu’ils me surprennent avec des saveurs que je n’ai jamais testées. Qu’ils me sortent de ma zone de confort !

J’ai tellement hâte d’être en Martinique pour vivre et partager ce moment avec eux. Cette édition est vraiment spéciale : les 10 ans de The Bartenders Society, les 270 ans de Saint James, les 260 ans de Marie Brizard, et les presque 50 ans de Caraïbos… Tout a été pensé pour en faire un événement exceptionnel.

S’il y a bien une année où il faut participer à The Bartenders Society, c’est celle-ci. Impossible de passer à côté !

Inscriptions sur www.thebartenderssociety.com

Vous souhaitez vous inscrire pour la finale France hexagonale ? Le thème de cette année est: “THE ANNIVERSARY : célébrez un événement qui vous a marqué ces 10 dernières années".

Mission : S'inspirer d'un souvenir personnel, d'un moment inoubliable ou d'un événement historique, pour créer un cocktail original qui ravive l'émotion de cet instant mémorable.

Etapes :

  • INSCRIPTIONS : Entre le 03 Mars et le 31 Mars 2025
  • MASTERCLASSES digitales (Démonstration, inspiration du thème) : 18 et 24 Mars 2025
  • SÉLECTION NATIONALE ET ANNONCE FINALISTES FRANCE HEXAGONALE : Début avril 2025
  • FINALE FRANCE HEXAGONALE : Du 27 avril au 01 Mai 2025 à la Martinique
Author

Fondateur de ForGeorges - plus de 1 000 bars testés à travers le monde - prend autant de plaisir à tester un nouveau bar, que déguster un spiritueux ou un verre de vin en bonne compagnie ! Spécialiste de la loi Évin et dénicheur de bonnes idées et innovations pour les marques d'alcool ! Son cocktail préféré ? Tous à partir du moment où ils font passer un bon moment (mais ne crache jamais sur un old fashioned bien réalisé ! ). Auteur des livres : Le Whisky C'est pas Sorcier, Le Rhum c'est pas sorcier et Les Cocktails c'est pas Sorcier, aux éditions Marabout et traduits en plusieurs langues (Anglais, chinois, japonais, russe, italien, néerlandais...) Auteur des livres : Le Whisky C'est pas Sorcier, Le Rhum c'est pas sorcier et Les Cocktails c'est pas Sorcier, aux éditions Marabout et traduits en plusieurs langues (Anglais, chinois, japonais, russe, italien, néerlandais...)

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