Il travail sur l’une des plus belles terrasses de Paris, juste à côté de Saint-Michel… A gauche la Tour Eiffel, au centre Sacré Coeur et à droite les tours de Notre Dame. Georges a donc profité que le ciel parisien soit à son top pour aller interviewer l’ami Mathieu le Feuvrier, chef barman à Le Quarante Trois cocktail bar ! Un passionné qui nous raconte ses motivations, sa passion et ses astuces ! En plus il nous dévoile la recette de son cocktail solidaire pour l’association « Les enfants du Mékong ».
Merci de prendre du temps pour répondre à nos questions ! Commençons par les travaux pratiques, tu nous sers quoi pour accompagner cette interview ?
Vu que Georges avait apprécié le Prucia lors d’une précédente viste, je te sers un daiquiri Prucia. C’est un twist de Daiquiri avec Havana 3 ans, sucre, citron vert, sirop d’agave et liqueur de prune Française Prucia. C’est bon, c’est frais, c’est simple, juste parfait !
Est-ce que tu peux te présenter brièvement pour nos lecteurs qui ne te connaissent pas encore ?
J’ai fais un BEP / CAP hôtellerie restauration, suivi d’une mention complémentaire barman à Dinard. Deux saisons à Courchevel au Portetta, deux fois 6 mois en Angleterre en saison d’été, dans le sud, à Dartmouth et Plymouth. Et après, 4 ans de Pologne à Cracovie au bar la Pergamin, et depuis 2010, ici au 43 !
Barman, c’est un métier de création, quel est le cocktail signature que tu aurais aimé inventer ?
C’est tout bête mais ça serait la Tommy’s margarita qui est mon cocktail préféré. C’est un twist de la margarita classique, servie sur glace : téquila, sirop d’agave et jus de citron vert, puis au shaker. C’est un cocktail qui a été créé en 1980 par Julio Bermejo qui fait parti des « nouveaux classiques ». C’est divin !
On le sert en twist sur la terrasse, il s’appellera le Mathy’s Margarita avec des herbes de Provence et une liqueur de thym en plus.
Yoko Ono a inspiré John Lennon, qui t’inspire ?
Marc Battais (Rires). Non non ne marque pas ça ! (Rires à nouveau)
Plus sérieusement, tout le monde m’inspire : mes clients, mes collègues barmen, quand je vais au marché : je regarde je fouille, mais je n’ai pas de sources spécifiques !
Je te vois souvent partagé des choses sur Facebook. Tu sembles connecté comme barman (Twitter, Facebook, forums) ? Le web tu t’en sers pour quoi ?
Facebook car c’est un réseau super important avec une grosse communauté de barmen français et internationaux et tu peux facilement échanger, ça aide à voir ce que eux font, et voir ce qu’il se passe même au niveau des marques .
Pour moi, il y a la page Facebook, le Twitter, DrinkAdvisor, Foursquare… du 43, que j’anime de A à Z, qui est moyen de com’ extraordinaire.
On dit que les voyages forment la jeunesse, est-ce que ça forme un barman ?
Je dirais oui et non car aujourd’hui tu n’as plus besoin de partir pendant 1 ou 2 ans dans un pays pour voir ce qu’ils font. Tu peux faire l’aller retour en un week-end dans toute l’Europe. Après pour mon exemple personnel, je suis parti en Pologne et tu apprends plein de choses sur toi même, à la base je suis quelqu’un de timide et réservé, pour dire je suis dans le bar, je suis obligé de faire plus que les autres pour exister dans ce bar et ça permet de voir d’autres modes de consommation et de vie. J’ai ramené des techniques de Cracovie, des produits du Cambodge….
Quand tu es Barman il faut voyager. Je dis toujours : un passeport, un sac à dos, un shaker. Il suffit de parler quelques mots d’anglais et c’est parti !
Il faut le faire avant d’avoir une femme et des enfants (rire)
Ton prochain voyage c’est où ? Tu visiteras quel bar ?
Il y en tellement qu’il faudra que je m’organise. Mon prochain gros voyage sera la Birmanie.
Tu peux nous parler de ton cocktail « humanitaire » ?
Il s’agit du Kampot-Cuba. On l’appelle cocktail solidaire plutôt que cocktail humanitaire. Par cocktail, on reverse 2 Euros à l’ONG Les enfants du Mekong. Ça leur permet de financer la scolarité d’enfants de la maternelle à la Fac. Ça a commencé l’année dernière et depuis mon voyage au Cambodge où j’ai visité le centre, j’ai ramené de là bas du poivre.
La recette :
4cl d’ Havana 3 ans infusé aux 3 poivres de Kampot, 1 cl de sirop d’agave, 1 bar spoon de sucre de banane, 2 cl liqueur de thym, 2 cl jus de citron vert, au shaker, sur glace, décorer d’une branche de romarin, et un tour de poivre moulu sur le dessus.
(NDLR : Georges l’avait gouté et avait adoré !)
Qu’est-ce qui a provoqué cette vocation de barman ?
C’est mon premier stage de BEP lorsque j’étais en lycée hôtelier. Au bout de 3 semaines, le maitre d’hôtel m’a mis au bar pour servir les apéros, les gins tonic. Je me suis retrouvé derrière ce petit bar où j’avais rien, même pas de shaker, et je me suis dit que le contact et le service avec les clients étaient bien. Et c’est de là où tout a commencé. J’ai ensuite enchainé avec mon bac pro.
Le gros déclic c’est quand j’ai fait ma mention bar au Normandie à Deauville où je me suis retrouvé avec Marc Jean. Un des grands grands messieurs du milieu. Quand on voit le personnage, tu es juste en admiration devant ce mec là. C’est un des mecs qui m’a vraiment donné envie de persévérer dans ce milieu là.
Est-ce que tu as un barman / un bar que tu as en admiration, à qui tu voudrais ressembler ?
Encore Marc Jean car il est passionné et il a une connaissance énorme ! Après je m’inspire des autres barmen comme Marian Beck, Alex Kratena plus proche de nous tu as Maxime Hoerth qui est un génie. Après il y en tellement d’autres…
L’alcool est une base importante dans un cocktail, mais il n’y a pas que ça, quel type de produit préfères-tu travailler pour créer un cocktail ?
Le sirop d’agave. Et surtout les herbes … avec tous ça c’est tellement riche en saveurs que tu peux travailler à l’infini. Je m’éclate vraiment à créer avec ça.
De plus en plus de bars se proclament « Bar à cocktails » avec plus ou moins de succès… quelle est leur principale erreur ?
Il y en a un paquet mais les deux principales : le prix et le fait de faire des cocktails sans savoir les faire. Moi ça me dérange pas de payer un prix élevé, mais si le prix du cocktail n’est pas en adéquation avec le cadre, la qualité du service et les ingrédients utilisés dans ton verre, ça ne marchera pas. Souvent à Paris, même dans le quartier on voit les cocktails à 12 Euros avec des rhums bas de gamme, alors que ici pour 1 euro de plus on est sur un vrai cocktail.
La nébuleuse des bars à cocktails français se densifie, quel conseil peux-tu donner au consommateur pour qu’il puisse se repérer ?
Regarder le back bar, les bouteilles qui sont au comptoir. Il faut aussi regarder la carte si c’est marqué juste vodka, juste rhum, ou juste téquila et regarder ce que le mec prend pour faire ton cocktail. S’il a une belle bouteille de rhum et qu’il prend un Negrita… Tu vois direct qu’il n’est pas là pour la qualité.
Quel serait ton nom de super-héros ?
Marc Battais (Rires) Je ne sais pas… (il réfléchit) En fait je ne sais pas du tout. Je pourrais te dire super-barman mais c’est un peu facile !
Si je me retrouve perdu dans une convention de barmen, je parle de quoi pour ne pas me faire démasquer ?
Tu peux demander « Est-ce que tu as lu le dernier Ginger ? » Ou « quel Vermouth tu prends pour ton Negroni ? »
Si tu devais créer un cocktail ForGeorges tu l’imaginerais comment ?
ça dépend à quel moment tu vas le déguster … Mais ça serait un cocktail simple, élégant et efficace.
En France avec la loi Evin c’est assez difficile pour les alcooliers de communiquer, en revanche dans le monde ils rivalisent d’ingéniosité. Selon toi, quel a été le meilleur coup de communication (BtoB ou BtoC) d’une marque ?
Sans hésiter en France c’est Monkey Shoulder et de loin ! Avec les Monkey Crashers, les Monkey Hours, ils font beaucoup de choses pour la communauté de barmen. Ils organisent plein d’évènements à destination des barmen. Ils ont de l’avance…
De plus en plus de marques organisent leurs concours destinés au barmen. Est-ce que tu penses que c’est une bonne chose ou il y en a trop ?
Je pense que chaque concours a son identité, son univers et son besoin. Il faut des concours pour tout le monde, pas seulement pour des barmen à bar à cocktails, il en faut aussi pour ceux qui sont dans les bars à envoyer. Je trouve ça très bien ce qui permet de réunir les barmen.
Quel est ton concours préféré ?
J’en ai deux en fait : le calvados nouvelle Vogue, c’est carré et millimétré. C’est France le matin et International l’après midi. Donc en trois jours on rencontre pleins de gens.
Le second que j’adore plus que tout est le G’Vine. Le master program c’est « The Truc ». ça dure une semaine, tu as plusieurs épreuves différentes, c’est vraiment super complet et tu rencontres des gens extraordinaires. En une semaine j’ai plus appris plus sur le Gin que j’ai pu en apprendre en 10 ans !
Vous êtes comme les médecins, pas le droit de parler de vos patients, mais je suis sure que t’as un potin à me raconter, je ne demande pas de noms promis !
(Rires.) Oui beaucoup… mais ce qu’il se passe au 43 reste au 43 !
T’as un remède contre les cheveux qui poussent le lendemain ?
J’en ai deux, un soft et un plus hardcore. Quand tu sors tu bois un cocktail, un verre d’eau. Je ne peux pas t’expliquer mais ça aide et le lendemain tu prends une zywiec, c’est une bière Polonaise que tu trouves à la Grande Epicerie, avec du sirop de framboise. Quand j’étais en Pologne je faisais ça.
Le plus hardcore : c’est un shot de vodka avec du poivre moulu !
Un conseil pour quelqu’un qui veut draguer en faisant un cocktail à sa copine pour l’impressionner chez lui ?
Déjà qu’il sache ce que la fille aime. Si elle veut du sucré ou de l’acide, il faut qu’il aille chez Sipeasy. Il y a des coffrets clé en main. Il a les doses, les ingrédients et il ne se trompe pas.
Quel est ton produit coup de coeur du moment ?
C’est un gin américain que j’ai dégusté il n’y a pas longtemps. C’est le Smooth Ambler Gin et vieillit en fût de Bourbon. J’ai dégusté ça hier, t’as le côté Gin avec des arrières gouts de bourbon, c’est une tuerie. C’est légèrement ambré, un peu comme le Havana 3 ans.
Beaucoup de spiritueux ne sortent pas en France (ou beaucoup plus tard que sur les autres marchés). Lequel voudrais-tu voir commercialisé ?
Pas spécialement. Avec Internet, tu trouves tout. Ça te coûte toujours un peu plus cher pour le faire venir mais je me débrouille. Soit par Internet, soit des potes qui travaillent à l’étranger qui te l’envoient.
En France il y a déjà tellement de nouveautés que je préfère me consacrer sur ce qu’on a déjà, sinon je ne m’en sors plus.
Chez ForGeorges on parle de spiritueux mais aussi de vin, une bonne bouteille à me conseiller ?
Je ne suis pas un grand fan de vin, mais un que j’aime beaucoup et qui est sympa pour draguer : le Saint Amour. Avec ça t’es refait ! Un vin rouge léger. Mais après le vin ne me fait pas fantasmer.
C’est bientôt ton anniversaire ? Tu veux quoi comme cadeau ?
Le 7 Juin. Et comme cadeau je veux juste être heureux et continuer d’apprécier ce que je fais et continuer de vivre de ma passion ! Et avoir du soleil pendant 5 mois pour la terrasse du 43 (NDLR : les fesses de Marc Battais ont été censurées au passage).
Question carte blanche, quelque chose à ajouter, un message à faire passer ?
Continuez de vous faire plaisir, continuez à faire vivre des expériences à nos clients.
Merci pour ton temps, un dernier conseil, qui je devrais aller interviewer après toi ?
C’est pas parce qu’il est là, mais Marc Battais parce que c’est un barman dans l’évènementiel et donc il a une autre vision et c’est quelqu’un que j’apprécie particulièrement professionnellement. Tu as aussi Guillaume Bisiaux du Jeffrey’s. C’est une très belle personne et l’établissement est top. Un petit génie du shaker ! Après c’est biaisé car c’est ma petite amie mais Anais Teulier. Elle a un grand talent et est au UC 61.
Après il y en d’autres jusqu’en Pologne mais ça va te faire un peu loin !
Le quarante trois cocktail bar
4 Rue Danton, 75006 Paris
01 81 69 00 60
Page Facebook
Terrasse accessible uniquement sur réservation